Le Maître de Cabestany
Une énigme médiévale
Présentation
Le Maître de Cabestany est un maître anonyme sculpteur de la seconde moitié du XIIe siècle, une personnalité artistique constituée par les historiens de l'art à partir des années 1930 par le rapprochement de plusieurs œuvres remarquables par leur style et leur facture, au premier rang desquelles le tympan de Cabestany, d'où le nom de « maître de Cabestany ». Ses œuvres sont pour la plupart situées dans les actuels départements de l'Aude et des Pyrénées-Orientales ainsi que dans le nord de la Catalogne ; mais on a aussi reconnu sa main en Toscane et en Navarre.
Une découverte providentielle est à l’origine de la renaissance d’un remarquable sculpteur et de son œuvre datant du Moyen Âge. Un tympan de style roman (classé auprès des Monuments historiques) fut mis au jour dans les années 1930 lors de travaux d’agrandissement de l’église paroissiale de Cabestany. Les hautes qualités techniques, le thème et l’originalité du tympan menèrent les érudits de l’époque à l’étudier et à le comparer à d’autres sculptures médiévales. Leurs conclusions révélèrent un artiste anonyme, nommé depuis lors le Maître de Cabestany, ayant sculpté des œuvres (chapiteaux, sarcophage, modillons…) aujourd’hui présentes dans de hauts lieux religieux.
Les sculptures du maître ont toutes en commun un style bien particulier. Elles ont des visages triangulaires, des fronts bas, des mentons écrasés, des oreilles hautes et creusées, des yeux étirés en amande avec un trou de trépan de chaque côté, des mains aux doigts longs et effilés, beaucoup de plis sur les drapés et un grand nombre de détails autour des personnages principaux.
Différents sites géographiques
Au total, à travers l’Europe, 121 pièces sculptées sont attribuées au Maître ou à son atelier.
Pyrénées-Orientales
- Cabestany : le tympan isolé conservé dans l'église paroissiale Notre-Dame-des-Anges
- Monastir del Camp : chapiteaux du portail occidental attribués à son atelier
- Le Boulou : frise du portail occidental de l'église paroissiale Sainte-Marie.
Catalogne
- Sant Pere de Rodes : les fragments conservés du portail détruit de l'église abbatiale
- Gérone : certains chapiteaux de l'église abbatiale de Sant Pere de Galligants
Navarre
- Errondo : le tympan provenant de l'église aujourd'hui conservé dans la Cloisters Collection du Metropolitan Museum of Art de New York
Aude
- Rieux-Minervois : chapiteaux de l'église de Sainte-Marie, dont il serait également l'architecte et le maître d'œuvre
- Abbaye de Saint-Hilaire : le sarcophage-reliquaire de saint Saturnin dans l'église abbatiale
- Abbaye de Saint-Papoul : les sculptures de l'abside de l'église abbatiale
- Abbaye Sainte-Marie de Lagrasse : les fragments conservés d'un portail détruit de l'église abbatiale (pour certains chercheurs, il s'agirait plutôt là d'œuvres dues à son "école" ou à son atelier)
Toscane
- Abbaye de Sant'Antimo : chapiteau de la nef de l'église abbatiale représentant Daniel dans la fosse aux lions
- San Giovanni in Sugana : colonne sculptée conservée aujourd'hui au musée d'art religieux de San Casciano in Val di Pesa (Toscane)
Le Maître de Cabestany à Saint-Hilaire
le sarcophage dédié à Saint-Sernin
L’œuvre maîtresse que l’on trouve à St Hilaire est un sarcophage-reliquaire en marbre blanc des Pyrénées. On parle d’un sarcophage, mais il n’en est rien, car cette cuve est trop étroite de l’intérieur et la face arrière n’est pas sculptée. On pense donc qu’à l’origine cette pièce devait se trouver dans le chœur de l’église en tant que maître-autel.
Cette oeuvre retrace l’histoire de Saint Sernin (ou Saturnin), 1er évêque de Toulouse au IIIème siècle et, plus précisément de droite à gauche, son arrestation, son martyre et son ensevelissement.
- petit côté droit : on peut voir au centre St Sernin qui tient sa crosse de sa main droite et le livre des Evangiles posé sur sa poitrine. A sa droite, c’est St Honest, évêque de Pampelune (Espagne) et à sa gauche, St Papoul, évangélisateur du Lauragais (Castelnaudary). Honest et Papoul sont deux martyrs qui furent disciples de Sernin.
- face principale, à droite : On retrouve St Sernin avec le livre des Evangiles grandement ouvert sur sa poitrine car il commence sa mission d’évangélisation et va se mêler à la population pour prêcher. Malheureusement pour lui, St Sernin a vécu vers l’an 250, au moment des persécutions de Dèce (empereur romain) et le christianisme n’était pas encore toléré. St Sernin est donc arrêté par des soldats romains (l’un d’entre eux l’attrape par le cou). À noter des têtes d’animaux sculptées entre les jambes des romains, symbolisant sans doute la barbarie et le paganisme.
- face principale, à gauche : par le biais d’une corde, St Sernin est attaché à la patte arrière d’un taureau aiguillonné par un bourreau et excité par 2 chiens qui aboient et essaient de lui mordre les pattes. St Sernin semble serein et bénit de sa main droite les 2 femmes qui se trouvent au dessus de lui: ce sont les Saintes Puelles (en latin : jeunes filles vierges).
- petit côté gauche : il s’agit de la mise au tombeau de St Sernin. Au centre, on peut voir le corps du Saint étendu et soutenu par les deux Saintes Puelles, ainsi que des femmes tenant un vase d’aromates pour embaumer le corps.
Du corps du Saint s’élève un enfant dénudé et nimbé qui représente l’âme de Sernin s’extrayant de son enveloppe charnelle et qui s’élève vers le Paradis où elle est accueillie par un ange.
Tout au fond, le tombeau de St Sernin est béni par deux anges thuriféraires qui déversent de l’encens et par la main de Dieu qui descend du ciel. Sous le tombeau, on aperçoit des femmes qui viennent se recueillir sur la tombe du Saint certainement dans le but d’obtenir guérison ou miracle...
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Quelques liens pour aller plus loin